Texte de Christiane Laforge

Lu à la présentation de Georges Wilfrid Pedneau au Gala de l’Ordre du Bleuet, le 11 juin 2016



La musique du vent sur les drisses des voiliers qu’il construisait s’est glissée sur les cordes de son violon. C’est ainsi qu’Éloi Pedneau, capitaine navigant sur le fleuve Saint-Laurent, a transmis à son fils Georges Wilfrid l’amour de la musique.


Né le 24 septembre 1903 à l’Anse aux sables de L’Île-aux-Coudres, cadet d’une fratrie de 9 enfants, le jeune garçon quitte son île à 6 ans pour faire ses études au collège des frères Maristes de Baie-Saint-Paul. Musique et Beaux-Arts se disputent ses talents d’artiste qu’il va développer comme apprenti à l’institut des arts décoratifs Marier et Tremblay de Québec. Il s’initie à la peinture, la création de décors, le vitrail, la dorure, tout en continuant la musique, grâce à laquelle il rencontrera l’âme sœur, Rolande Pelletier, pianiste qui l’accompagnera dans ses choix et son engagement musical.


Son apprentissage terminé à l’Institut, l’artisan Pedneau parcourt le Québec pour y pratiquer son métier. Sa route croise celle de l’abbé Herménégilde Fortin, organiste à la cathédrale de Chicoutimi, qui le convaincra, plus tard, de s’installer au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Auparavant, la crise économique des années 1930 affecte lourdement les ambitions de Wilfrid qui voit s’amenuiser le nombre de ses contrats et celui de ses élèves de violon. Son frère Philippe l’invite à le rejoindre à Montréal pour travailler avec lui chez un facteur de pianos, instrument très populaire dans une époque où l’on ignore encore tout de l’électronique. C’est ainsi que l’artisan en arts visuels et musicien ajoute à ses cordes déjà bien variées, celles d’accordeur de piano et d’orgue. Métier qui fait cruellement défaut à la région de l’abbé Herménégilde où la musique est enseignée avec ferveur dans toutes les congrégations. À partir de Saint-Jérôme (Métabetchouan) où ses sœurs Élise et Clarisse, organistes toutes deux, vivent, Wilfrid Pedneau parcourt un vaste territoire, jusqu’à Chibougamau et la Côte-Nord par train, par autobus et, à la belle saison, sur une vieille Harley-Davidson, pour accorder les instruments de musique tout en donnant des concerts.


Tout ce temps, il ne renonce pas à cette demoiselle Pelletier de la rue D’Aiguillon de Québec. Les amoureux se marient en 1940 et s’installent à Chicoutimi, d’abord sur la rue Labrecque avant de construire, deux ans plus tard, leur première maison sur la rue Jacques-Cartier. Ils voyagent, donnent des concerts, font l’animation musicale lors de divers évènements et s’occupent de leurs cinq enfants. Louis-Marie et Pierre optent pour l’ingénierie électronique, Andrée pour la pharmacie et la physiothérapie tout en récoltant deux médailles d’or comme musicienne. Michel choisit le violoncelle et fait des études en Arts à l’Université du Québec à Chicoutimi, Guy aime le violon, mais s’inscrit au Conservatoire de musique en percussion. Il fondera le Studio Le Terroir en 1981, spécialisé en enregistrement et composition. Michel et Guy, membres de l’orchestre des jeunes et de la Société philarmonique, perpétuent le métier de leur père comme accordeurs de piano.


La maison familiale est un temple de la musique. « Tous les jours, les élèves de piano se présentaient à la maison, raconte Guy Pedneau. Notre mère pouvait avoir bon an mal an 20 ou 25 élèves. La plupart des soirs, après sa journée de travail, mon père donnait aussi des cours de violon ou de violoncelle. Il y avait aussi les répétitions de l’orchestre des jeunes et de la société philarmonique les mardis soir auxquelles nous assistions mon frère et moi. Il y avait le quatuor qui répétait les dimanches soir. Enfin, notre tante Élise qui habitait au deuxième donnait des cours d’orgue sur l’harmonium que mon père lui avait installé. On entendait les pieds des étudiants en marteler le pédalier. »


Enseigner le violon et le violoncelle, aider les luthiers de la région pour l’obtention de bourses, accorder des pianos, des orgues afin que tout soit parfait pour les concerts et les enregistrements de CBJ Radio-Canada, concertiste et chef d’orchestre, c’est toute la vie méconnue d’un artiste qui se révèle ici.


Modestie, générosité et passion musicale résume G. Wilfrid Pedneau. Ayant initié à la musique plusieurs générations, souvent rétribué en « monnaie de ciel », c’est en réunissant les musiciens entre eux qu’il veut contribuer au rayonnement de la musique. Il regroupe une trentaine de musiciens pour créer un ensemble de cordes qui, sous le nom de Les loisirs en musique vont offrir des concerts publics. Un début au mouvement qui contribuera à la naissance de la Société Philarmonique de Chicoutimi, en unissant ses cordes aux cuivres d’Yvon Gaudreault, le 5 décembre 1965 à l’auditorium du Petit Séminaire. Ce travail dans l’ombre, cette détermination à former des musiciens de qualité, tous ces doigtés sur clavier et coups d’archet sur les cordes enseignés avec patience et dévouement sont à l’origine de l’Orchestre symphonique du Saguenay–Lac-Saint-Jean, comme de nos écoles de musique. Sans aucun doute, le nom Pedneau peut s’inscrire avec orgueil parmi ceux qui ont contribué à l’épanouissement de la musique au Saguenay–Lac-Saint-Jean.


Georges Wilfrid Pedneau est décédé le 29 octobre 1987, suivi, le 10 janvier 2011, par sa compagne de toujours, Rolande Pelletier qui, à 96 ans, enseignait encore le piano.


« Aujourd’hui, il serait certainement bien étonné de recevoir l’Ordre du Bleuet, écrit son fils Guy au nom de toute sa famille. Son humilité naturelle, sa grandeur d’âme et sa bonté émanaient tout simplement de lui. Ceux qui l’ont connu et qui vivent encore aujourd’hui en sont témoins. Il serait très heureux que cet hommage soit rendu aujourd’hui, à lui et à son épouse, complice de cette belle aventure. »


Le 11 juin 2016


GEORGES WILFRID PEDNEAU


Violoniste, concertiste et chef d’orchestre

Pour sa contribution remarquable à la vie musicale

Du Saguenay–Lac-Saint-Jean


FUT REÇU MEMBRE DE

L’ORDRE DU BLEUET

À TITRE POSTHUME


Dans cet hommage, nous tenions à souligner

l’appui indéfectible de sa compagne

ROLANDE PELLETIER


Pianiste, musicienne, professeur de piano

qui a consacré sa vie à l’enseignement de la musique


mardi 14 juin 2016

LA FAMILLE DE WILFRID PEDNEAU ENCHANTÉE DU GALA HONORIFIQUE

Georges Wilfrid Pedneau, musicien

Un Gala inoubliable

Encore merci pour cette inoubliable soirée des médaillés. Nous avons tous été impressionnés par la qualité de cet évènement. Également par le calibre des nominés. Il est évident que cet évènement, cette pointe d'iceberg,  résulte de l'ensemble des mois et des mois d'efforts soutenus ayant conduit à cette formidable concrétisation: cette soirée n'en a été que la manifestation visible. Bravo à vous tous. De plus, nous avons connu des gens remarquables avec qui nous avons pu échanger, un florilège de belles têtes! 

Votre site internet immortalise maintenant ces individus dans le temps à partir d'aujourd'hui: c'est génial. J'ai d'ailleurs des amis à l'étranger qui pourront bientôt visionner le montage vidéo réalisé avec brio par Ariel Laforge : encore bravo. De plus, j'ai beaucoup aimé l'utilisation appropriée de la voix de Patrick (Leblanc) pour la narration... C'est exactement le genre de voix que j'entendais moi-même... Enfin, l'intervention de l'auteure sur le texte que je lui avais fait parvenir  à su en condenser l'essentiel en un tout très touchant... Cela est unanime de la part de ceux qui ont lu la version longue.  

J'ai, pour ma part rapporté le plus fidèlement possible les éléments historiques, en tentant d'éviter la  mièvrerie et en documentant mes affirmations avec les ressources dont je disposais, rassuré que j'étais qu'en ces choses, on complèterai le tout....Et j'ai découvert par vos propres recherches des photos complémentaires très intéressantes. Merci encore.   

Voilà donc pour cette belle histoire en partie passée en partie immortelle maintenant...

Bravo, bravo et longue vie à l'Ordre!


Guy Pedneau et toute sa famille




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POURQUOI L'ORDRE DU BLEUET

L'intensité et la qualité de la vie culturelle et artistique au Saguenay-Lac-Saint-Jean est reconnue bien au-delà de nos frontières. Nos artistes, par leur talent, sont devenus les ambassadeurs d'une terre féconde où cohabitent avec succès toutes les disciplines artistiques. Cet extraordinaire héritage nous le devons à de nombreuses personnes qui ont contribué à l'éclosion, à la formation et au rayonnement de nos artistes et créateurs. La Société de l'Ordre du Bleuet a été fondée pour leurs rendre hommage.La grandeur d'une société se mesure par la diversité et la qualité de ses institutions culturelles. Mais et surtout par sa volonté à reconnaître l'excellence du parcours de ceux et celles qui en sont issus.